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@helloitsanha x eikimoze ⚡️ |
C’est l’histoire banale d’un esprit vif, curieux, enthousiaste. Le genre à lire Le Monde Diplomatique le matin, à refaire le monde à midi, et à rêver d’en changer le soir. Puis un jour, boum : embauche dans un grand groupe.
Badge magnétique, mug floqué, onboarding bienveillant. Et là, lentement mais sûrement, quelque chose se passe. Ou plutôt, ne se passe plus.
Les idées s’émoussent, l’élan se dilue, la pensée critique prend des RTT. À la machine à café, on ne débat plus : on synergie. À la pause déjeuner, on ne s'indigne pas : on priorise. Et devant son écran, on ne pense plus vraiment : on exécute, poliment, en silence, dans l’ombre d’un process validé par le COMEX.
Bienvenue dans la matrice molle du salariat à grande échelle ou à Lobotoland, là où votre cerveau part en séminaire permanent.
On ne pense plus, on "collabore" et on note sur Glassdoor.
Ici, les cerveaux ne créent pas : ils synchronisent. PowerPoint devient un dialecte, Teams une religion, et le post-it jaune, l’unité de mesure officielle de la réflexion. L’idéation est un sport de groupe. Mais attention : pas trop d’idées non plus. Ça pourrait déranger. On brainstorme en cercle, mais surtout pour tourner en rond.
Le syndrome du slide 46.
La pensée critique meurt quelque part entre le KPI « aligné » et le OKR « déclinable ». Vous vouliez réinventer le monde, on vous demande de réécrire le compte-rendu d’un point hebdo sur un projet suspendu depuis 2019. Avec des smileys, c’est plus engageant.
Des cerveaux en full remote.
Le télétravail aurait pu sauver les esprits. Raté. C’est désormais l’usine à visios. Des réunions pour planifier des réunions. Le néo-langage managérial se propage plus vite que ChatGPT : "on va pivoter", "on est dans le faire", "on co-construit", "on incarne". Mais quoi ? Personne ne sait.
La start-up attitude, version préretraite.
Dans certains open spaces, on a troqué les bureaux gris contre des babyfoots et du café équitable. Pas pour penser différemment, non. Pour faire "jeune", tout en gardant les process du siècle dernier. Le cerveau croit s’évader. Mais il reste en prison.
Le mythe de la mission pour être en haut du panier.
« Tu travailles chez L'Oréal ? Trop bien, vous changez le monde avec vos dashboards d’éco-socio-performance inclusive ! » En vrai, vous passez vos journées à renommer des fichiers Excel et à remplir des templates en Arial 12. L’impact ? Il est dans le bilan RSE. Pas dans votre cerveau.
Résistance : mode avion mais pas que...
Certains tentent encore de penser autrement. Mauvaise idée. Ils finissent en « task force innovation » pilotée par le directeur du contrôle de gestion. Ironie ultime : on leur demande de « penser out of the box » avec un budget validé en 18 étapes. Ça calme.
À quand la greffe de courage managérial ?
Le problème n’est pas le grand groupe en soi. C’est sa capacité à transformer tout salarié un peu vif en zombie corporate bienveillant, agile, et surtout... docile. Le cerveau n’est pas mort. Il est juste en stand-by. En attente de validation par le N+1.
Les internes n’attendez pas d’en arriver là
— Antoine Julienne (@dr_a_julienne) November 23, 2023
Dans le désordre 2016 2019 2022 2023.
On voit directement celle où j’etais seul interne dans le service, 7h30-20h qu’on me laissait pas manger le midi.
Sur une ligne d’astreinte supplémentaire souvent pas de repos.
Rép en dessous pic.twitter.com/j7XbWzKkyX
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